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28 novembre 2010 7 28 /11 /novembre /2010 23:46

24 NOVEMBRE.  À  FEU ET À SANG.

 NB: CET ARTICLE A ÉTÉ ÉCRIT MERCREDI....

 

Hier, 23 novembre, le but était d’aller voir Mousson à Camp Perrin.

De partager, à nouveau, son enthousiasme communicatif et de lui proposer des pistes d’actions communes.

 

Jacmel/ Camp Perrin, c’est plus de 6 heures de route. Quand tout va bien, en roulant cool.

 

Alors quand votre ami Doudouche est arrivé le matin, que son pneu arrière s’est dégonflé, et que ses freins sont restés un peu collés, je me suis dit que la journée ne commençait pas trop bien.

 

Pourtant, tout devait être sympa, soft.

 

Une jolie journée de début d’hiver tropical, un soleil juste chaud et un ciel clair, des banderolles de candidats, colorées, bariolées, qui donnent un air de kermesse aux rues de Jacmel.

 

Des musiques à fond, des klaxons, du son. De la musique tropicale qui me fait, même moi, un peu chalouper.

 

Une journée normale, quoi.

 

Le pneu réparé, le plein fait, cap vers le sud à un rythme de … sénateur. Les freins collent. Pas de puissance dans la montée. Ça me rappelle ma panne de turbo sur le 807, sur l’A8, vers Saint Tropez.

Ou celle de la Lexus ( car j’ai conduit une Lexus, oui, dans  la plaine de La Crau, un jour où on allait voir Marine à Monps.

 

Quatre arrêts plus tard, vers 14 heures, à fond … sur le bitume collant.

 

Et puis, un ralentissement, quelques voitures à l’arrêt. On se croirait en août.

 

Blocus ( bouchon), accident ?

 

Non, barrage. Un camion et son énorme remorque sont en travers, puis un autre, et un autre encore. Pourquoi ils ont tous un pneu crevé ?

 

La police arrive,  et débloque le barrage.

Et 500 mêtres plus loin, un autre arrêt. Autres camions.

 

Et là on en apprend un peu plus. Tout est bloqué un peu plus loin.

Manifestation liée aux élections : des arrestations suite à des contestations, puis des contestations suite aux arrestations…

 

J’y étais et j’ai vécu l’évènement.

 

Je vais donc raconter. Ce que j’ai vu, photos à l’appui.

Il y  aura deux versions : la dramatique, à la journaliste fraichement débarqué de son studio du XVIème ( faut qu’ça saigne, coco ) ( version 1)

 

Et puis, la réelle. ( Version 2)

 

Elles seront également exactes, vécues, vérifiables et réelles.

 

Version 1.

 

Nous arrivons au premier barrage. On sentait la tension croître, ce camion des forces spéciales passant à fond ne présageait rien de bon.

 

Un peu plus devant, la route est bloquée.

Un énorme semi-remorque chargé de fers à béton est en travers et empêche tout passage. Si cela n’était pas suffisant, un autre camion barre le côté.

Des corps d’élite de la police sont là, déjà, musclés, bardés de protections et s’activent à faire sauter le barrage.

 

On nous dit que plus loin la route est à nouveau coupée, que les émeutes font rage.

Des témoins affirment que deux partis s’affrontent, que la violence est extrême.

Les policiers ont dégagé un passage et nous disent de passer quand même.

 

Y aller, pour tomber dans un autre blocage ?

 

Les passagers des taps taps passent à pied.

Des motos qui filent, des gens grimés : en fait ils se mettent du dentifrice sous le nez et sous les yeux pour atténuer les effets des gaz lacrymogènes. ( Pau, Lau, essayez…)

 DSC05963.JPG

Un rasta, couteau en mains vient menacer un chauffeur de tap tap de lui crever les pneus. Personne ne bouge. Le chauffeur accepte de se mettre en travers.

 

De la fumée rend floue la vision,  des heures d’attente, on fait quoi, on va dormir  où ?

La route est bloquée des deux côtés. Souricière.

Pas d’issue. Tension extrême.

 

Et si cela tournait en émeute ?

 

Et si cela devenait « à feu et à sang » ?

 

 

Puis, après des heures interminables,  on réussit enfin  à s’enfuir par des chemins de traverse.

Retour à Jacmel.

 

Version 2.

 

Nous arrivons au premier barrage. Un énorme semi-remorque chargé de fers à béton est en travers et bloque tout passage. Si cela n’était pas suffisant, un autre camion barre le côté.

Des corps d’élite de la police musclés, bardés de protections  discutent tranquillement, on parle de leur camion , Français et ancien,  et décident enfin à demander au chauffeur du camion de bouger un peu . Juste pour que les voitures passent.

 

Je discute avec un policier qui me dit : c’est la vie.

 

Il remonte dans son camion. Le Sticker «  GENDARMERIE » est à peine effacé. Un don de nos gendarmes ?

 

De la fumée s’étale sur la route : des vendeuses qui chauffent un repas improvisé.

Elles reviennent de Miragoane, dans leur tap –tap plein de matelas. On aura de quoi dormir ce soir.

 P1040207.JPG

On attend, on discute. Si ça dégénère, pas de problèmes : Doudouche s’est parké devant la base de l’ONU…

 

Puis, fatigué d’attendre, je décide de repartir vers Jacmel. Un autre camion bouche la route du retour.

 

Un saut à Diffou, chez les «  femmes décidées » , les copines de Laurène et de Catherine. Nos amies. Elles nous expliquent la situation : un gars arrêté pour avoir décollé des affiches, une manifestation de ses copains pour qu’il sorte de prison. A quatre heure, on le libèrera …

 

Entre temps, on dort où ?

On dormirait ici, sans problèmes. Les femmes d’OFDD se sont concertées : elles nous recevront chez elles…

 

Mais vers cinq heures, la route se libère.

Nous rentrons.

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